Pendant la nuit du premier vendredi de l'année 1868, le 3
janvier, à un moment où Louise était en prière,
une sorte de rayon de lumière pénétra son âme,
la transporta hors d'elle-même et produisit une grande joie suivie
de grandes souffrances. Des élancements aigus partaient du coeur
et, comme des sillons de douleur, allaient jusqu'au pieds et au côté.
Ces manifestations mystérieuses se renouvelèrent durant les
vendredis suivants. A partir du vendredi 24 avril, à l'imitation
des plaies de Jésus, le sang se mit à couler, d'abord du
côté gauche, puis des pieds et des mains. Bientôt apparurent
les blessures de la couronne d'épines et, plus tard, une plaie à
l'épaule droite. Le sang ne coulait pas durant les autres jours
de la semaine; à l'endroit des stigmates, on remarquait une surface
d'une teinte rosée, sèche, entièrement fermée
et un peu plus lisse que la peau environnante. On a évalué
la quantité de sang s'écoulant à un minimum de 250
grammes. |
L'extase du vendredi :
A partir du 17 juillet 1868, l'apparition des stigmates s'accompagna
de l'extase. Jusqu'alors, Louise était profondément absorbée
en Dieu, mais sans perdre l'usage de ses sens. L'extase suspendait l'activité
des sens et rendait Louise étrangère à ce qui se passait
autour d'elle, totalement insensible, même à la piqûre
d'une lame de canif que lui fit un jour le docteur Lefèbvre. La
durée de l'extase a varié, mais elle s'est toujours manifestée
au moins dans l'après-midi du vendredi.
Louise a parlé de ces extases aux prêtres qui l'on interrogée.
Elle comportaient une lumière spirituelle qui révélait
quelque chose de la grandeur de Dieu : "Je suis saisie d'un si grand
sentiment de la présence de Dieu que je ne sais où me mettre.
Je le vois si grand et moi si petite que je ne sais où me cacher.".
Puis elle contemplait diverses scènes de la Passion du Christ.
"Ces scènes, disait-elle, se présentent devant moi
d'une manière plus rapide et plus claire que si je les voyais de
mes propres yeux.".
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L'extase de la communion :
La sainte communion produisait aussi en Louise une telle union au Christ
que le monde extérieur disparaissait à ses sens. Tant qu'elle
put se rendre à l'église, dès qu'elle avait communié,
elle revenait à sa place sans aucunement s'en rendre compte; cette
intense union au Christ durait environ une demi-heure.
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"Je ne pouvais pas suivre la messe que M. le curé disait habituellement
après ma communion. Je sais maintenant que je me levais pour la
consécration, mais je ne connais pas comment cela se faisait."
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Cette action mystérieuse de l'eucharistie continua à se
produire lorsque Louise dut recevoir la communion chez elle.
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Le jeûne total :
Le 30 mars 1871 fut le dernier jour où Louise put prendre de
la nourriture sans en être incommodée. Depuis ce jour jusqu'à
Pâques le 9 avril, elle ne put prendre aucun aliment. Le jour de
Pâque, elle parvint, difficilement, à manger un très
petit morceau de pain et, le lendemain, une demi-pomme fut son unique repas.
Dans la suite, si sur les instances de sa famille ou de son curé,
elle prenait si peu que ce soit de nourriture, elle devait le vomir au
prix de pénibles efforts. On se garda bien dès lors de l'importuner.
Seule l'eucharistie ne l'incommodait pas.
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L'insomnie :
A partie du 15 septembre 1868, jour où elle reçu les blessures
de la couronne d'épines, Louise n'eut plus aucun besoin de sommeil.
Les nuits blanches sont longues pour le commun des hommes; ce n'était
pas le cas pour Louise. Sa profonde union à Dieu lui faisait perdre
la notion du temps.
"Grâce à Dieu, disait-elle, la nuit passe comme
le jour sans presque que je m'aperçoive de rien. C'est comme une
pensée toujours la même qui m'empêche de sentir le temps."
Malgré le jeûne, l'insomnie, les pertes de sang des stigmates
qu'aucun aliment ne réparait, Louise se chargeait des travaux les
plus pénibles de la maison. Lessiver, nettoyer la maison, bêcher
le jardin, le fumer, y porter les seaux d'eau nécessaires à
l'arrosage rentraient dans ses attributions familiales.
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En semaine, sauf le vendredi, Louise partageait son temps entre les
soins donnés aux malades, l'aide aux pauvres, l'acceuil des visiteurs,
qui ne venait pas que le vendredi, et les travaux de la maison par lesquels
elle s'efforçait d'aider le plus possible sa mère et ses
soeurs.
A partir du mois de janvier 1876, il fut impossible à Louise
de se rendre encore à l'église. Elle resta désormais
à la maison et on lui apportait chaque jour la communion. Le 5 janvier
1879, elle dut s'aliter et cessa de travailler. Les souffrances de Louise
augmentèrent encore durant les derniers mois de sa vie, en 1883;
elles étaient pour ainsi dire continuelles, ne cessant que durant
l'extase du vendredi et après la communion.
Louise Lateau mourut le 25 août 1883, vers 6 heures 30 du matin.
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